Un bain de lait de jument à la Cléopâtre
La famille Marti possède une exploitation d’alpage depuis 110 ans. Le propriétaire actuel, Heiri, et son épouse Ursula recherchaient des alternatives pour exploiter durablement l’alpage en créant de la valeur ajoutée. Aujourd’hui, leurs revenus proviennent à 50% du tourisme. Grâce à d’authentiques bains de fines herbes et de petit-lait.
La montée depuis Matt, dans le canton de Glaris, jusqu’à l’immense zone d’alpage de la famille Marti, qui s’étend à une altitude de 1400 à 1600 mètres au-dessus du niveau de la mer, est une expérience inoubliable. Notamment lorsqu’il pleut à torrents et que le brouillard permet à peine de voir jusqu’au sapin suivant. Par contre, avec un temps pareil, le promeneur rencontre des douzaines de salamandres noires. Et l’une ou l’autre des variétés d’orchidée ou de luxuriantes inflorescences de lis martagon enchantent ses yeux. Là où la forêt fait place à la prairie d’alpage et fleurissent des douzaines de délicates plantes alpines, se trouve un panneau d’avertissement: vaches allaitantes! La prudence est donc de mise. Cependant, par temps de pluie, les animaux se tiennent à proximité des chalets; l’une d’elles vient même de donner naissance à un petit veau.
Fromage d’alpage de Glaris
Les Marti estivent en ce moment 220 têtes de bétail dans leur alpage. Ces bêtes appartiennent à d’autres agriculteurs. Les Marti s’en occupent, traient les sept bêtes qui n’ont pas de veau à faire téter, et transforment un jour sur deux le lait en quatre meules de fromage. Ils achètent le lait aux paysans. Ils sont donc libres de commercialiser eux-mêmes le fromage d’alpage. Et c’est ce que font habilement les vachers, qui ont trois employés. Là-haut, même par mauvais temps, on se sent bienvenu et en sécurité. Angela, l’aide-fromagère allemande, gestionnaire en économie familiale diplômée, accueille les visiteurs. Pendant ce temps, Ursula Marti prépare un bain. Et c’est agréable, pour le randonneur trempé jusqu’aux os, de pouvoir monter dans un baquet de petit-lait chaud et de savourer une coupe de champagne dans le Berglialp, le chalet des Marti situé le plus bas. A vrai dire, il doit aussi être agréable, par beau temps, de terminer de cette manière une journée éprouvante, lorsque la vue s’étend bien au‑delà du pays glaronnais. Quoi qu’il en soit, sur l’alpage, les offres de wellness semblent avoir du succès.
Que faire du petit-lait?
Autrefois, quand septante vaches laitières paissaient sur l’alpage de la famille Marti, le petit-lait servait à nourrir les porcs d’alpage. Aujourd’hui c’est pour les amateurs de randonnée une raison de faire une halte au Berglialp et de s’offrir un peu de bien-être en plein air. Les Marti ont commencé avec cette idée novatrice dès 1996. Un premier Hot Pot a été transporté sur l’alpage par la voie des airs, des bains de fines herbes ont été préparés. Ou d’autres de petit-lait ou de lait de jument. «Nous avons beaucoup investi dans la publicité. Même le montant du prix, par la suite», raconte Ursula Marti. «Cela a duré trois ans, voire cinq, avant que notre idée rencontre vraiment le succès», explique cette mère de quatre garçons. Les époux Marti ne se sont inscrits pour l’agroPrix qu’en 2007, avec une idée relativement ancienne. Toutefois, ils ont été rapidement sélectionnés, et leur apparition au Kursaal de Berne leur a laissé une impression inoubliable. Et les Marti ont été, jusqu’à présent, les seuls Glaronnais à remporter l’agroPrix. Ce n’est pas surprenant: les quatre fils des Marti sont de beaux et charmants garçons, ils ont rapidement conquis les cœurs des clients, tout comme l’authentique baquet en bois et leurs sympathiques parents. Les Marti repensent volontiers à cette époque et se réjouissent des réactions en majorité positives. Car, depuis, le destin a frappé: au mois d’avril 2012, leur fils aîné a eu un accident d’escalade et depuis il est au centre de paraplégiques de Nottwil. «Nous espérons qu’il pourra au moins remarcher un jour», dit tristement son père. Il va de soi que l’exploitation d’alpage est totalement incompatible avec un fauteuil roulant. Toutefois, malgré ce coup du sort, cette famille de montagnards regarde vers l’avenir. De nouvelles idées se concrétisent régulièrement. Maintenant, les Marti proposent également, en hiver, des soirées wellness conviviales pour les groupes, en bas, dans la vallée. En été, outre les bains, ils invitent également leurs clients à des trekkings avec des chèvres, dont une de leurs connaissances est responsable. Et désormais, on peut aussi réserver des trekkings avec les deux ânes de la famille Marti. La famille ne sait pas ce qu’est l’ennui. A lui seul, l’acheminement quotidien d’aliments frais pour les clients avec le petit téléphérique de transport prend beaucoup de temps. Les époux Marti ne laissent cependant rien au hasard. Ce qu’ils peuvent gérer, ils le font intelligemment. Par contre, ils supportent les coups du sort avec la force et la patience nécessaires.